Adieu Camille Vallin

 

J’ai assisté à la cérémonie d’hommage à Camille Vallin organisée par la mairie de Givors le 14 août 2009.

Mis à part le bref et émouvant discours de Pierre le fils de Camille, les autres discours étaient consternants.

Il ne s’agissait pas de discours pour rendre hommage à Camille, l’homme exceptionnel qu’il était, mais un hommage à la politique du P“c”F.

C’est là toute la contradiction qui a accompagné la vie de Camille et qui le poursuit jusqu’après sa mort. Comme je l’écris ci-dessous, je pense sincèrement que cet homme exceptionnel a été gâché par l’appareil du parti communiste.

Pour l’illustrer, je vous présente ci-dessous des extraits de deux de mes ouvrages : L’appareil et Fandom rédigés  entre le dernier millénaire et celui-ci.

Vous pouvez lire l’intégralité de ces ouvrages en les téléchargeant gratuitement ici :

http://www.alainpelosato.com/appareil.pdf

http://www.alainpelosato.com/livres/fandom.pdf

Plus bas vous pourrez lire un extrait de mon livre Au fil du Rhône, histoires d’écologie qui retrace les actions que j’ai menées avec Camille Vallin dans le domaine de l’écologie et l’environnement.

Mon livre Au fil du Rhône, histoires d’écologie est disponible dans ma boutique Priceminister

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Extraits de mon livre “L’Appareil” :

 

Dès mon retour de l’armée[1], la première réunion à laquelle j’assistai, était une assemblée générale des communistes de Givors. Un compte-rendu du comité central. C’était le nouveau secrétaire de section qui présentait le rapport (c’est comme ça qu’on dit ; expression typique d’une certaine bureaucratie...). A la tribune : Camille Vallin, avec Christian, le jeune secrétaire de section, Antoine S. et Raymond R. Ce dernier, était aussi un militant exceptionnel. Un ouvrier fondeur qui avait lutté aux hauts fourneaux de Chasse-sur-Rhône, et qui était embauché pour exercer les activités de secrétaire du maire. Camille Vallin, le maire, était membre du comité central, un homme de « l’appareil », mais formé aussi en dehors de ce dernier, confronté aux problèmes de l’élu local, aux affaires des gens à régler, donc relativement peu coupé des réalités. Cela n’empêchait pas (et n’empêche toujours pas...) les défauts inhérents à cette fonction d’homme de « l’appareil », mais a créé quelques tensions entre lui et d’autres dirigeants. Raymond, un petit homme très maigre, à la santé fragile, minée par son dur travail de fondeur (il est d’ailleurs mort de la silicose), très fidèle au parti, dans le sens de fidélité à un idéal d’humanisme, de solidarité, idéal commun à nombre d’adhérents du parti communiste, mais curieusement absent, ou, disons, mal visible, chez la plupart des gens de « l’appareil ».

Nous avons vu comment Louis Aragon avait noté que les « intellectuels » souffrent constamment d’une suspicion de la part des militants. « Quel intérêt ont-ils de venir au parti, ces intellectuels ? » Se disent-ils. « S’ils viennent c’est qu’ils sont intéressés par une carrière. Or, cette carrière politique est exclusivement réservée aux ouvriers. » C’est d’autant plus important, que bien souvent, l’intellectuel arrive avec un bagage, une culture, qu’il a déjà les moyens de briller et qu’il est beaucoup plus difficile à former dans le moule de « l’appareil ».

Mais revenons donc à mon ami Raymond, fumeur de Gauloises sans filtre invétéré, ce qui n’était pas bon pour sa santé, car il avait des difficultés respiratoires. Ce dernier faisait une comparaison entre la situation de programme commun dans laquelle nous étions avec celle du front populaire. Il déclara donc, en passant : « Nous allons certainement créer des comités du programme commun, avec les autres partis signataires.  

— Ah non ! Répondit Camille Vallin. Le comité central a décidé[2] qu’on ne ferait pas comme au temps du front populaire. »

Voilà, le comité central l’avait décidé et donc, nous étions contents. Quant à savoir pourquoi, nous ne le comprîmes que quelques années plus tard, quand nous apprîmes que Georges Marchais avait prononcé un rapport « secret » à ce comité central, rapport dans lequel il évoquait le risque d’être dépassé par le P.S. sur le plan électoral et qui envisageait déjà, en quelque sorte, la sortie du programme commun qu’il venait de signer. Dans ces conditions, on comprend aujourd’hui, qu’il était impossible de constituer des « comités du programme commun ». Quand je pense à l’énergie considérable que nous avons déployée pour vendre ce petit livre noir, j’en suis épouvanté, alors que, déjà, « l’appareil » avait décidé que ce n’était qu’une alliance de façade. Et, connaissant aujourd’hui l’existence de ce rapport, on se demande comment cette direction a pu faire l’erreur monumentale de ne pas présenter de candidat communiste aux élections présidentielles de 1974 !

 

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Aussi quand Christian me dit à une réunion du secrétariat de la section que le maire de Givors avait un boulot à me proposer, j’étudiai la question avec intérêt.

Ce fut donc en septembre 1973 que je rentrai à la mairie de Givors avec le grade de technicien. Mes fonctions ? membre du cabinet du maire avec mon ami Raymond et la charmante secrétaire du maire, la regrettée Rosette, qui deviendra ma belle-sœur en 1979 (ma rencontre avec sa sœur Raymonde n’a rien à voir avec la présence de Rosette à la mairie ; j’ignorais d’ailleurs qu’elles fussent sœurs.) La première fois que je la vis taper à la machine, je faillis tomber à la renverse : ses doigts parcouraient si vite le clavier qu’ils en devenaient invisibles et le bruit obtenu était un véritable crépitement. Incroyable ! Ma formation supérieure en chimie était très utile pour aider Camille à diriger une association de communes riveraines du Rhône qui s’occupait de lutter contre les nuisances et pollutions. J’effectuais ce travail jusqu’en 1983, date à laquelle je fus élu maire-adjoint de Givors, la mairie de Pierre-Bénite m’ayant accueilli entre temps pour ma fonction de technicien.

 

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(…) Camille Vallin. J’en ai parlé plus haut. Je pense sincèrement que cet homme exceptionnel a été un peu gâché par « l’appareil » dont il a fait partie pendant longtemps. Les électeurs de sa commune et au-delà ne s’y sont pas trompés : le score qu’il réalisait aux élections locales dépassait très largement le score du parti communiste. Des hommes comme lui, n’ont jamais eu la possibilité de diriger « l’appareil ». Trop brillants, trop compétents, trop populaires...

 

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Aujourd’hui se prépare le trentième congrès du parti[3]. Je lis que le comité national connaît des débats intenses : doit-on faire élire le secrétaire national par le congrès ? Ce genre de débat est consternant ! Ce n’est pas l’élection du secrétaire national qui pose problème, c’est le congrès lui-même ! En effet, qu’est-ce qu’un congrès du P.C.F. ? c’est une réunion des permanents du parti qui se fait tous les trois ans. Une grande messe de « l’appareil » ! J’ai participé à trois de ces congrès. Je vous en parle un peu.

Le vingt-sixième congrès vit la suppression de la « dictature du prolétariat ». Ce fut une bonne chose en soi. Mais autant, juste avant, nous devions encenser l’union soviétique, autant, cette fois, je fus quand même surpris d’entendre Pierre Zarka faire une déclaration antisoviétique à la tribune ! A tel point que le représentant du parti communiste de l’union soviétique (un militaire couvert de médailles) quitta la salle. Pierre Zarka commença ainsi son ascension vers les sommets de « l’appareil ». Une carrière typique et incontournable pour réussir : être permanent dès l’âge de 17 ans à la jeunesse communiste, le rester ensuite au parti. Pour cela il faut donner des gages à « l’appareil ». Ce discours au vingt-sixième congrès fut certainement un de ces gages, car aujourd’hui Pierre est directeur du journal l’Humanité ! J’ai vu l’excellent Camille Vallin donner des gages de ce type aussi. Mais pas avec les mêmes effets.

Ce discours de Pierre Zarka est d’autant plus consternant quand on se souvient que Georges Marchais, en 1980 — trois ans plus tard seulement — fit une tonitruante conférence de presse à... Moscou ! pour défendre l’intervention soviétique en Afghanistan...

 

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Cet hiver fut très rigoureux. Nous étions contraints de rajouter beaucoup de sel dans la colle des affiches pour éviter qu’elle gèle contre les murs. J’ai toujours aimé les rendez-vous fraternels entre militants au petit matin pour aller coller des affiches : cette aération de l’esprit, ce sentiment d’être utile, cette espèce de guérilla pour rire avec les équipes d’afficheurs de nos adversaires politiques. Nous étions encore nombreux à participer aux « collages ». Des années plus tard, ce ne fut plus le cas. Parfois même, je partais seul couvrir les murs de Givors d’affiches, notamment — entre Noël et Jour de l’an de l’année 1988 — par un matin glacé dans un brouillard givrant, je collais le portrait de Camille Vallin partout pour la préparation des municipales de 1989.

 

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Dès 1982, le gouvernement Maurroy orientait la politique du gouvernement à droite. La politique de restructuration de la sidérurgie jeta des milliers de sidérurgistes à la rue. « L’appareil » restait quasiment muet. Il fallait préparer les municipales de 1983. Dans ma région, le gouvernement décida de transférer l’usine de machines-outils Berthiez de Givors à Saint-Etienne. Manœuvre politicienne maligne, car les deux villes étaient dirigées par un maire communiste... Le maire de Givors, Camille Vallin fulminait. Les ouvriers de Berthiez ne voulaient pas partir et se mirent en grève avec occupation de l’usine à Givors. Les manifestations se multiplièrent. Camille lança un appel à bloquer le T.G.V. si on n’entendait pas la voix des travailleurs de Givors. Mais cette action n’a jamais eu lieu. « L’appareil » veillait à ce qu’aucune manifestation ne gênât le ministre des transports Charles Fiterman. Je me souviens très bien de discussions avec Roland Jacquet[4] dans les manifestations : il était difficile pour lui de faire admettre la position de « l’appareil ». Et on connaît parfaitement bien les liens étroits entre « l’appareil » du P.C.F. et les directions de la C.G.T..

 

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Les élections municipales de 1983 furent relativement catastrophiques car il fallait faire la comparaison avec celles de 1977 qui furent excellentes pour la gauche. Nous perdîmes de nombreuses municipalités, dont celles de Saint-Etienne. Quasiment aucune ne fut reprise depuis. Nous conservâmes la mairie de Givors de justesse. Finis les scores électoraux pharaoniques ! Il fallait désormais compter sur un adversaire de droite résolu et sur un déclin du parti communiste qui allait continuer. Récemment, je discutais avec mon ami Camille Vallin sur mes positions personnelles. Je disais que j’en voulais à « l’appareil » d’avoir conduit mon parti où il se trouvait : à environ 6 % d’influence électorale !  Il voulut détourner les responsabilités en me disant : « Ce n’est pas « l’appareil » qui est responsable de la chute de l’union soviétique... » Le déclin du parti a commencé depuis bien plus longtemps. Depuis le vingtième congrès du parti communiste de l’union soviétique[5], alors que « l’appareil » du parti communiste français refusa de reconnaître les crimes de Staline en niant le rapport Kroutchev. A partir de ce moment, la direction de l’histoire avait tourné vers ce qu’on a appelé la chute du communisme. Cette chute est due essentiellement à la volonté exacerbée des « appareils » des différents partis communistes à rester au pouvoir. Après 1989, la plupart des membres de ces « appareils » des pays de l’est se sont facilement recyclés dans le personnel capitaliste et se sont enrichis. Cette solution ne fut pas possible, bien sûr, pour les membres de « l’appareil » français.

 

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En 1984, nous avions retrouvé un peu d’enthousiasme. Notre sortie du gouvernement devait nous redonner un peu de couleurs et de santé. Nous comptions là-dessus. Mais le déclin se poursuivit inexorablement... Pour nous, les gens de Givors (on dit : les Givordins) ce fut l’angoisse, car notre canton était renouvelable en 1985. C’était Camille Vallin qui était conseiller général depuis 1945. Déjà en 1979, j’avais été choisi par « l’appareil » pour assurer « la relève de Camille ». Ce fut le gentil Jean-Pierre Brunel qui fut chargé de l’agréable tâche de me le dire. La décision fut prise au comité de section, avec même un certain enthousiasme. Mais, la commune de Grigny que nous venions de prendre en 1977 restait fragile. Mon ami Roger Tissot craignait que, changeant de candidat, le parti communiste fût passé derrière le parti socialiste. Il fit grande pression auprès de Jean-Paul Magnon, alors nouveau secrétaire fédéral ayant remplacé Jean Capiévic. Roger se garda bien de m’en parler alors que j’étais déjà officiellement désigné candidat par les communistes de Givors. Jean-Paul Magnon me convoqua et me somma de renoncer à ma candidature ! C’était la seule solution pour éviter ma candidature, car, au vote des communistes, malgré l’opposition du maire de Grigny, je l’aurais largement emporté. Fidèle jusqu’au bout, je me résignais à retirer ma candidature devant le comité de section. Mauvais souvenir d’avoir une fois de plus obéi à « l’appareil ». Je fus donc doublement victime : je n’étais plus candidat et j’étais accusé par de nombreux camarades qui étaient partisans de ma candidature d’être « à la solde de la fédé[6] ».

Nous sommes donc repartis avec la candidature de Camille Vallin, qui, à l’époque, était passé dès le premier tour, même si son score avait bien baissé. En 1985, tout naturellement, le problème restait posé. « L’appareil » avait fini par décider qu’étant donné la faiblesse électorale du parti, il convenait de reconduire Camille comme candidat. Cette précaution ne suffit pas : nous fûmes battus par un élu de droite prétentieux et incompétent. La soirée du deuxième tour fut atroce : dès les premières centaines je compris la défaite. Je retrouvai Camille dans une petite salle contiguë au bureau de vote juste après le dépouillement. Je vis rapidement qu’il était inutile de lui donner mon sentiment : il le partageait car il avait tout compris au vu des premiers résultats. En homme courageux, il assuma son devoir de maire d’annoncer lui-même sa défaite (notre défaite). En 1987, je le vis également faire preuve du même courage lorsque nous perdîmes le siège de sénateur qu’il détenait. Il paya très cher de sa santé ce courage car il fut victime d’un infarctus (dont il se remit toutefois parfaitement).

La « bataille » du deuxième tour fut très intense. Nous allions voir les électeurs un par un. Je dirigeai moi-même ce travail de fourmi, bien que n’étant plus secrétaire de section, ayant été élu maire-adjoint en 1983. Jean-Paul Magnon venait nous soutenir tous les jours. Un jour il me demanda, en présence de Raymond Combaz, le nouveau secrétaire de la section :

« Qu’est-ce qu’il y a à faire aujourd’hui ?

— Eh bien, lui dis-je, il y a des tracts à distribuer, des affiches à coller et du porte à porte à faire... 

— Eh ! Tu vas pas demander à Jean-Paul Magnon de faire cela quand même ! »  Rétorqua Raymond.

Voilà ce que c’est que de monter en grade. C’est comme à l’armée, les généraux ne vont pas à la bataille...

 

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L’année 1999 est aussi l’année de préparation du trentième congrès du P.C.F qui doit avoir lieu en l’année 2000. J’ai suivi avec beaucoup d’intérêt sa préparation. Depuis le vingt-huitième congrès, j’ai pris mes distances. Lors de ce dernier congrès[7], au cours de ma conférence de section[8], je proposai une vingtaine d’amendements. A chacune de mes propositions — j’étais placé au fond de la salle — je vis Camille Vallin, ce vieux bolchevique assis au premier rang, lever la main et prendre la parole le premier pour réfuter ma proposition, avec, souvent, un geste de mépris de la main. L’ensemble des délégués présents, trop habitués à servir « l’appareil », se précipitèrent pour suivre son représentant et repousser tous mes amendements. C’est d’autant plus navrant que nombre de mes propositions repoussées seront appliqués par le comité national pour la préparation du trentième congrès.

 

 

 

Extraits de mon livre “Fandom” :

 

C’est d’ailleurs cette année-là que je mis en place le lent mais irréversible processus de ma disgrâce au PC. Il fallait préparer les élections cantonales de 1985. La situation du PC était très difficile politiquement car les ministres communistes venaient de quitter le gouvernement. Le PS local à Givors allait évidemment favoriser la perte du siège de Conseiller général tenu par Camille Vallin depuis…. 1945 ! Avant le Comité de section qui devait décider de qui devait être candidat, Camille Vallin, en bon stalinien, déclara au journal Le Progrès que c’était lui le meilleur. Je ne partageais pas cet avis, cet article me mit en colère et je fis part sans prudence de cette colère à mon amie Yvette qui s’empressa de rapporter mes propos irrévérencieux à Vallin. Je maintins néanmoins ma position contre la candidature de Vallin (il fallait renouveler !) au comité de section et au comité fédéral. Je fus battu bien sûr. Il faut dire qu’aux élections cantonales précédentes, en 1979, j’avais été désigné par la section et la fédération pour prendre la relève de Vallin. Tout était décidé quand soudain, Jean-Paul Magnon secrétaire fédéral, me fit savoir, avec ses manières de maquignon, que je ne pouvais plus être candidat car le maire communiste de la commune voisine, Roger Tissot,

 s’y opposait. Je pris cela comme une trahison de la part de mon ami Roger que j’avais contribué magistralement à faire élire comme maire mais je décidais de suivre les ordres fédéraux en déclarant que je n’étais plus candidat, ce qui mit en colère bien des camarades de la section. Je n’en fus pas remercié pour autant par le PC par la suite…

En 1989, aux élections municipales de Givors, tout le monde était étonné que je ne sois pas en tête de liste. Non ! C’était Vallin qui restait accroché à son poste de maire. Lors de l’hiver 1988, après les élections présidentielles qui ont vu le triomphe historique de François Mitterand, je me souviens d’avoir couvert les murs de portraits de Vallin pour la campagne municipale. Il fallait que tout soit clair : je ne tenais pas du tout à être maire PC, mais alors pas du tout… D’ailleurs, lorsque quelques années plus tard en 1993, Vallin, très tendu, m’annonça que ce ne serait pas moi le maire mais le petit Passi, il fut étonné de ma réaction passive. Dans ma tête je plaignis les Givordins d’avoir un maire aussi mauvais et dans les premières années de son mandant je m’évertuai à l’aider à prendre un peu de compétence sans réussir car l’intéressé lui-même souhaitait rester dans sa crasse.

En 1995 d’ailleurs, sous le prétexte du manque d’argent je fus licencié par le PC sans indemnité ni remerciements… Je dus donc réintégrer mes fonctions à la mairie de Pierre Bénite après douze années de détachement. Pas facile !

 

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J’avais encore en tête la fête des quatre-vingts ans[9] de Camille Vallin qui s’était déroulée quelques semaines auparavant et au cours de laquelle je me trouvais à la même table que lui et d’éminents membres du bureau politique du PC… Je pensais alors que le PC justement n’était pas étranger à cette situation de violences urbaines[10] à force d’avoir toujours laissé les délinquants garder le dernier mot sous prétexte d’exploitation capitaliste.

 

 

 

Vous pouvez lire l’intégralité de ces ouvrages en les téléchargeant gratuitement ici :

http://www.alainpelosato.com/appareil.pdf

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Camille Vallin, l’écologie et moi

 

On parle beaucoup aujourd’hui de l’engagement écologique de Camille.

C’est assez ironique, car ceux qui tentent d’utiliser cet engagement au profit du P“c”F, sont les mêmes qui à l’époque dénigraient systématiquement cette action.

Je dois dire également que j’ai joué un rôle important dans l’action qui a été menée.

J’ai été aux côtés de Camille pour lui apporter mes connaissances et mon expérience de 1973 à 1993, date à laquelle je l’ai remplacé comme président de l’Association pour la défense de la nature et la lutte contre les pollutions de la vallée du Rhône ; mon action a permis de créer deux autres associations de communes riveraines de la source à la mer, et je fus coordinateur de ces associations.

 

Pour illustrer mes propos je donne à votre lecture un chapitre de mon livre Au fil du Rhône, histoires d’écologie qui fut publié en 1992 à l’occasion du 20ème anniversaire de l’association de la vallée du Rhône et qui retrace nos actions pendant les 20 années qui ont précédé.

 

Extrait de mon livre Au fil du Rhône, histoires d’écologie (1992) :

 

Le fleuve est rouge !

 

Ce jour de septembre 1982, en passant sur le pont de l’autoroute, la couleur du fleuve m’avait intrigué : le Rhône avait des reflets rougeâtres, cuivrés, comme si le coucher de soleil s’y reflétait. Je me rendis au bord de l’eau où je constatai, atterré, l’étendue du désastre par la présence de nombreux poissons morts. Les équipes de sécurité avaient commencé de les ramasser.

Un technicien d’une entreprise privée sollicitée par la Direction de l’industrie (service des installations classées) était présent. Il me déclara qu’il faisait des prélèvements dans le but d’analyse. A ce moment arrivèrent deux enfants tenant, à chaque bout, un bâton sur lequel ils avaient enfilé par les branchies un superbe sandre d’un mètre cinquante ! Je prévins immédiatement les enfants du danger possible de consommer ce poisson et demandai au technicien de le récupérer pour analyse. D’où venait la pollution ? Les services avaient pris leur téléphone et interrogé les entreprises du couloir de la chimie. L’entreprise Rhône-Poulenc chimie fine, à Saint-Fons, avait déclaré avoir déversé ses « eaux mères d’hydroquinone » dans le fleuve. La réaction chimique de fabrication d’hydroquinone n’ayant pas réussi, l’usine a rejeté purement et simplement le liquide dans lequel elle devait se produire. Cette pratique était courante et n’avait jamais tué de poissons. Ce jour là, le Rhône devait être fatigué…

La culpabilité de cette entreprise semblait évidente. Nous avons donc porté plainte. Mais rien ne prouvait que l’hydroquinone avait tué les poissons… En se prévalant de cet argument, les dirigeants de Rhône-Poulenc nous demandèrent de retirer notre plainte. Nous avons émis, Camille Vallin et moi, deux conditions :  obtenir la garantie que ce type de pollution « normale », car il ne s’agissait pas d’un accident mais d’une « irrégularité » de fonctionnement comme le disaient les dirigeants du groupe, ne se reproduise plus à l’avenir, et avoir la collaboration des entreprises pour développer l’information sur leurs actions en faveur de l’environnement.

La première condition fut facilement remplie ; une station d’épuration sur le site. On nous assura qu’elle pouvait accepter les « eaux mères ».La seconde le fut partiellement : nous avons eu la collaboration de ces usines pour des stages de formation. Nous pensions, à juste titre, que l’action judiciaire aurait du mal à aboutir. Le déroulement de l’action menée par d’autres a montré que nous n’avions pas tort sur ce point : Rhône-Poulenc s’est battu jusqu’au bout en montrant que la preuve n’a jamais été faite de la responsabilité de l’hydroquinone dans la mort des poissons. Et effectivement, cette preuve n’a jamais pu être scientifiquement apportée. Aujourd’hui, nous jetons un regard  très critique sur l’attitude que nous avions adoptée à l’occasion de cette pollution. Nous voulions entamer une période plus positive de nos actions, montrer que l’industrie pouvait faire des efforts pour s’améliorer et cela nous a fait perdre de vue, dans ce cas précis, la nécessité de faire jouer à plein la loi contre ceux qui portent atteinte, en toute connaissance de cause, à l’environnement.

 

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[1] En 1972

[2] Une fois que cette expression consacrée a été prononcée, il était difficile de dire le contraire, car le comité central savait tout et avait toujours raison. Voir plus loin, comment cette « fétichisation » des organes de direction perdure jusqu'à nos jours.

[3] En 2000

[4] Il était alors membre du secrétariat fédéral du Rhône.

[5] 1956

[6] Aimable diminutif de la « fédération du Rhône du P.C.F. »

[7] Congrès qui fut chargé de modifier les statuts et de « supprimer » le centralisme démocratique ».

[8] La « conférence de section » est le congrès des cellules regroupées dans une section. Ce sont les cellules existant dans une zone géographique donnée. Ma section regroupe aujourd’hui quatre cantons. Aux temps héroïques de la puissance organisationnelle du P.C.F. le nombre de sections étaient plus élevées. A cette époque la tendance était à la séparation, la création de cellules nouvelles. Quelques temps après (début des années quatre-vingt) « l’appareil » imposa la tendance contraire : face à la peau de chagrin de l’organisation il fallut regrouper. Ces territoires sont donc fluctuants en fonction de l’état de l’organisation.

[9] Novembre 1998

[10] Cet extrait est tiré d’un passage où je décris les violences urbaines à Givors, notamment l’insurrection de janvier 1999 où de nombreuse voitures furent incendiées avec une tentative d’incendie de mon immeuble.