Le
« parti » et la Résistance
LE RÔLE du PCF dans
la Résistance a longtemps été un enjeu
politique. Après guerre, des polémiques sont nées,
dans le contexte de la guerre froide, en particulier avec les
gaullistes. Il s'agit d'une époque où le PC
représente un bon quart de l'électorat. Les
critiques à l'égard du parti de Maurice Thorez
portent sur plusieurs points : la demande de reparution de
L'Humanité en juin 1940 ; l'" appel du 10
juillet ", présenté par les dirigeants
communistes comme la preuve de leur choix de la Résistance
dès l'été 1940 ; la date d'entrée des
communistes dans l'action armée, avant ou après
l'attaque allemande contre l'URSS en juin 1941.
Les travaux des historiens ont apporté
des rectifications. Sur la demande de reparution de L'Humanité,
le discours du PCF a d'abord consisté à nier ou à
rejeter cette initiative sur des militants égarés.
En décembre 1947, face aux interrogations de Pierre de
Chevigné, député centriste et compagnon de
la Libération, Jacques Duclos répond que "
tout cela est une affaire de police et de flics ".
Pourtant, l'attaque subie devant l'Assemblée nationale va
porter. En 1949, une enquête interne au PCF, gardée
secrète, conclut que, de " la fin juin 1940 à
octobre 1940, une orientation politique comportant de graves
erreurs a été impulsée ".
Parmi les boucs émissaires, Maurice
Tréand se tait. Jean Catelas, qui a aussi participé
aux négociations, a été tué par les
Allemands. Cette politique, comme l'a montré Roger
Bourderon (La Négociation. Eté 1940, éd.
Syllepse, 2001), était celle de l'Internationale
communiste et de Staline. Les communistes, malgré des
nuances, suivaient la ligne. A l'exception du journaliste Gabriel
Péri, qui refusa de se commettre dans ces négociations.
Sur l'" appel du 10 juillet ", les historiens
Jean-Pierre Besse et Claude Pennetier présentent un
document accablant. Il s'agit de la photographie d'un numéro
de L'Humanité clandestine daté du 10 juillet
1940 et comportant le fameux appel, signé Jacques Duclos
et Maurice Thorez. Or il s'agit d'un faux, fabriqué dans
les années 1950, selon les auteurs, pour accréditer
une orientation politique qui, en fait, ne fut adoptée
qu'au printemps 1941 : l'union des communistes avec les autres
mouvements de résistance.
Quant à l'entrée massive des
communistes dans l'action armée, la majorité des
historiens estime qu'elle intervint à l'été
1941. Le PCF s'est présenté, après la
guerre, comme " le parti des 75 000 fusillés ".
Jean-Pierre Besse et Thomas Pouty, dans Les Fusillés,
répression et exécutions pendant l'Occupation
1940-1944 (éd. l'Atelier), estiment que 4 520
personnes ont été fusillées, en France,
pendant la guerre, dont 80 % à 90 % de communistes.
Michel Lefebvre
© Le Monde
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